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Et si on s’intéressait aux qualités pédagogiques dans la formation professionnelle ?


Les autorités administratives et les organismes financeurs sont actuellement focalisés sur le respect par les organismes de formation (OF) du référentiel QUALIOPI et sur l’enregistrement des prestataires sous-traitants auprès de la Préfecture de Région (avec un numéro de déclaration d’activité dit « NDA »). C’est certain : il y a réelle volonté de faire en sorte que le secteur des OF soit plus qualitatif.

Néanmoins, la méthode mise en œuvre produit-elle des résultats satisfaisants ?


Au risque de heurter la plupart des acteurs du référentiel QUALIOPI et certaines autorités administratives, il nous paraît important de répondre clairement par la négative ! Ni la généralisation autoritaire de la déclaration d’activité aux prestataires sous-traitants, ni le respect du référentiel QUALIOPI ne permettent d’améliorer ou d’encourager les qualités pédagogiques dans le secteur des OF. C’est même parfois le contraire, il y a de quoi être consternés quand nous voyons certains opérateurs offrir des services de «portage QUALIOPI», doublés parfois d’un «portage NDA», comme s’il suffisait de mettre à disposition une étiquette ou une simple coquille vide.

Les conséquences de cette politique sont de notre point de vue peu satisfaisantes, car elles tendent à tromper le public sur le choix de l’organisme de formation avec lequel il va se former.

Combien de fois avons-nous eu à déplorer les pratiques de certains organismes de formation (trop nombreux) qui ne savent ni recueillir et analyser des besoins de formation, ni concevoir un véritable programme de formation, ni élaborer un véritable référentiel de formation, ni définir clairement des objectifs pédagogiques ? Pourtant, ces organismes de formation ont tous été approuvés dans le cadre standardisé du référentiel QUALIOPI. Parfois, ils ne sont que de simples entremetteurs ou des intermédiaires de commerce mettant en relation un acheteur et un formateur. L’expression de «broker de la formation» est parfois utilisée pour désigner ces derniers. Ne parlons pas des modalités pédagogiques mises en œuvre, quand l’art de faire un exposé pédagogique n’est soumis à aucun savoir-faire, quand l’exposé prétendument pédagogique n’est soumis à aucune prise en compte des méthodes d’apprentissage, quand l’évaluation des acquis se résume à un simple quizz ou autres QCM sans intérêt. Il est vrai que ces constats sont souvent réalisés chez les OF qui se concentrent sur le CPF, mais ce n’est pas le seul domaine dans lequel nous opérons ces constats. Nous pouvons constater les mêmes écueils dans les actions de formation inter-entreprises (notamment en langues étrangères et en bureautique) proposées aux PME et TPE, et parfois même dans certaines actions de formation intra-entreprise. Dans le secteur des organismes de formation en alternance, les écueils sont différents mais nous constatons que la culture des qualités pédagogiques n’est pas toujours au rendez-vous.

En parallèle, les organismes de formation qui savent développer de façon remarquable les qualités pédagogiques ne sont pas facilement reconnaissables.


Comment ne pas nous émouvoir en pratique quand nous identifions un organisme de formation qui déploie au quotidien des trésors d’imagination pour innover et développer sur le thème des qualités pédagogiques, et dans le même temps, un autre organisme de formation qui va se contenter de mettre à disposition un outil de formation à distance ou un formateur auto-proclamé en ne s’impliquant aucunement sur l’identification des besoins et sur les résultats produits. Pourtant, à l’égard du grand public, ces deux organismes de formation sont réputés être du même niveau de qualité, puisqu’ils sont tous deux étiquetés avec le fameux sésame QUALIOPI. Et que dire des quelques organismes fraudeurs qui noircissent tant le tableau, et qui sont les premiers à afficher le logo QUALIOPI comme un gage de reconnaissance étatique.

Ce constat amer nous conduit une nouvelle fois à en appeler aux pouvoirs publics pour un changement de cap majeur dans les politiques publiques mises en œuvre

  • Oui, le déploiement du référentiel QUALIOPI apporte une norme de référence pour mesurer des aptitudes à satisfaire des exigences communes,

  • Non, le respect du référentiel QUALIOPI n’offre pas vraiment de gages du point de vue des qualités pédagogiques,

  • Oui, l’Etat doit revoir sa politique pour encourager les organismes de formation à travailler sur leurs qualités pédagogiques à partir de points-clés,

  • Non, la généralisation à marche forcée de la déclaration d’activité des prestataires sous-traitants ne favorise pas les qualités pédagogiques, et elle ne fait qu’augmenter la lourdeur administrative de façon inutile,

  • Oui, l’Etat doit augmenter les capacités des autorités de contrôle chargées de sanctionner la fausse sous-traitance, pour assurer le respect de la loi et réguler les distorsions de concurrence dans le secteur des organismes de formation.

Quant à la sacro-sainte certification professionnelle, censée là aussi être un gage de qualité, il est important de rappeler que, en dépit des nombreux efforts déployés pour augmenter les niveaux d’exigence pesant sur les organismes certificateurs, le constat que nous faisons n’est pas toujours rassurant :

  • Tout d’abord, dans le cadre du CPF, les taux de passage des épreuves de certification, et de réussite auxdites épreuves, sont souvent trop faibles, car les titulaires des comptes CPF se désintéressent eux-mêmes trop souvent de ladite certification (en particulier dans les formations en langues étrangères et en bureautique), ce qui démontre que la matrice même du CPF et ses conditions d’éligibilité doivent être encore revues ou améliorées,

  • L’augmentation des exigences dans le cadre des épreuves de certification est manifestement bienvenue, mais celle-ci ne permet pas toujours de promouvoir et d’encourager les qualités pédagogiques des organismes de formation qui préparent aux épreuves de certification, car ces qualités pédagogiques sont parfois hors de contrôle du certificateur.

Nous estimons qu’il faut remettre le cœur du métier de la formation au centre du système : prenons exemple sur les modèles de qualités pédagogiques qui réussissent pour en faire des repères adaptés à chaque dispositif de formation, favorisons la professionnalisation des opérateurs en mesurant notamment l’ingénierie de formation mise en œuvre, mesurons les résultats à travers de véritables protocoles d’évaluation des acquis, et faisons globalement en sorte de mettre en avant les bonnes pratiques pédagogiques en encourageant les organismes qui doivent servir de modèles. Revoyons la définition légale d’un organisme de formation, pour que les simples intermédiaires de commerce soient qualifiés de «mandataires» et non pas d’organismes de formation. Les chaînes de sous-traitance qui se développent dans le secteur des OF montrent que l’on fait injure aux véritables organismes de formation en qualifiant ces simples intermédiaires de commerce d’organismes de formation. Enfin, nous proposons de réviser la politique de la déclaration d’activité pour parvenir à un dispositif régulant l’accès à la profession, sous la forme d’une attestation de capacité acquise au terme d’un parcours de formation minimum obligatoire pour pouvoir diriger un organisme de formation.

Les OF doivent eux-mêmes proposer des méthodes pour établir un lien de confiance avec l’Etat et les organismes financeurs.

Pour notre part, nous continuerons de militer pour une révision du millefeuille juridico-administratif qui est souvent infructueux au regard de l’objectif de qualité précité. Comme d’habitude, les réactions, les contradictions sont bienvenues car elles permettent d’alimenter notre réflexion. Les bonnes idées et les suggestions aussi ! Pourvu que les spécialistes de la «qualité» au sens de QUALIOPI ne nous tordent pas le cou…

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